Intervilles : la bagarre de 1971 et la réaction de Guy Lux
L’histoire de la télévision française est émaillée de moments inoubliables, et la finale d’Intervilles de 1971 en fait indubitablement partie. Cet événement, marqué par une bagarre inattendue sur le plateau, a mis en lumière non seulement la fragilité du direct, mais aussi la « grande classe » de Guy Lux et l’incident qui a blessé Léon Zitrone, co-animateurs emblématiques du jeu.
Contexte d’une Émission Culte : Intervilles
Intervilles, diffusée pour la première fois en 1962, est rapidement devenue un phénomène de société, incarnant le divertissement populaire familial. Le programme opposait deux villes françaises dans une série d’épreuves ludiques et souvent burlesques, dont l’affrontement avec les célèbres vachettes. Le duo d’animateurs, Guy Lux et Léon Zitrone, était au cœur de ce succès. Guy Lux, avec son énergie débordante et son sens de l’improvisation, complétait parfaitement la prestance et le professionnalisme de Léon Zitrone, connu pour sa diction impeccable et son sérieux presque académique. Zitrone avait rejoint Intervilles après une période difficile au journal télévisé, trouvant dans l’émission un nouveau rôle en tant que co-animateur aux côtés de Lux et Simone Garnier.
L’Incident de la Finale de 1971
C’est en 1971, lors de la finale tant attendue du jeu, que le déroulement habituel d’Intervilles a été brusquement interrompu par un incident majeur. Une échauffourée a éclaté entre les équipes participantes, dégénérant rapidement en bagarre générale, hors du champ des caméras mais audible pour le public et les animateurs.
Alors que Léon Zitrone tentait de comprendre la situation et potentiellement d’intervenir, il a été bousculé au milieu de la mêlée. Ses lunettes ont volé en éclats et il a lancé, hors micro, qu’il ne voyait plus rien. Cette confusion a plongé l’antenne dans une brève période de stupeur, créant un moment de tension palpable pour les téléspectateurs habitués à la jovialité de l’émission.
La Réaction Mémorable de Guy Lux
Face à cet imprévu, c’est Guy Lux qui a repris la parole avec une fermeté inattendue, marquant les esprits par sa réaction empreinte de dignité et de colère. Visiblement ulcéré par le comportement des participants, il a condamné sans détour les incidents qui venaient de se produire à Dax, soulignant l’objectif de l’émission de divertir la France entière dans un esprit bon enfant. Il a fustigé les « énergumènes » qui prenaient mal la victoire ou la défaite et s’en prenaient aux animateurs.
La « grande classe de Guy Lux » s’est manifestée lorsqu’il a publiquement affirmé son amitié pour Léon Zitrone. Il a déclaré qu’il aurait « stoppé immédiatement Intervilles la finale et les résultats n’auraient pas compté si [s]on grand ami Léon avait eu la moindre blessure ». Il a également exprimé l’espoir que la police de Dax et les personnes de bonne volonté interviendraient pour faire sortir les perturbateurs. Ce discours, prononcé en direct, a été acclamé par les spectateurs présents, transformant un moment de chaos en une démonstration de caractère et de leadership.
La Complémentarité du Duo Lux-Zitrone
L’incident de 1971 n’était pas le seul exemple de moments de tension ou de désaccord en direct entre les deux animateurs, bien que les situations fussent généralement moins dramatiques. En 1964, par exemple, les téléspectateurs avaient assisté à une discussion animée entre Guy Lux et Léon Zitrone concernant le comptage des points lors d’une rencontre entre Chantilly et Compiègne. Chacun défendait sa position avec conviction, mais toujours dans le respect et le style courtois qui les caractérisaient. Ces échanges, même conflictuels, faisaient partie du charme d’un direct plus artisanal, où l’authenticité primait sur le formatage, et où la personnalité des animateurs pouvait s’exprimer pleinement.
L’Héritage d’Intervilles et ses Évolutions
Après le duo mythique de Guy Lux et Léon Zitrone, Intervilles a connu de multiples tentatives de relance et de modernisation. Les producteurs ont cherché à adapter la formule aux goûts du jour, en jonglant entre le folklore local, les défis physiques et l’humour. Cependant, la magie de l’ère Lux-Zitrone, caractérisée par une spontanéité inégalée, une bonne humeur contagieuse et les incontournables vachettes, n’a jamais été pleinement retrouvée.
Plus récemment, une version relancée sous la houlette de Nagui n’a pas réussi à convaincre le public. Malgré une promotion importante, les audiences ont été décevantes, et de nombreux téléspectateurs, qu’ils soient nostalgiques ou nouveaux, ont exprimé leur désenchantement. Cette nouvelle version a souvent été perçue comme trop formatée, manquant de cette alchimie unique de spontanéité et d’élégance qui avait fait le succès des premières années d’Intervilles.
Conclusion
La bagarre lors de la finale d’Intervilles en 1971, avec Léon Zitrone blessé et la réaction ferme mais élégante de Guy Lux, reste un épisode marquant de l’histoire de la télévision française. Il témoigne d’une époque où le direct réservait son lot d’imprévus et où la personnalité des animateurs pouvait transformer un incident en un moment culte. La capacité de Guy Lux à gérer la crise avec autorité et bienveillance envers son ami Léon Zitrone est restée un exemple de professionnalisme et d’humanité. Cet événement souligne la singularité d’une émission et d’un duo qui ont su, malgré les péripéties, laisser une empreinte indélébile dans le paysage audiovisuel français.
